dimanche 15 avril 2012

La malédiction et le roman gothique

Au cœur des romans gothiques, le lecteur est toujours confronté à une intrigue forte. Cette dernière est souvent soutenue par une malédiction, une énigme prophétique. Le rang ou la lignée des personnages a aussi une place prépondérante. Cette notion de sang est établie et les exemples sont nombreux. « Le moine » de Lewis est un bel exemple pour cette démonstration. Dans « Le château d’Otrante » de Walpole, C’est la spoliation d’une lignée qui est à l’origine de l’empoisonnement du maître des lieux. Des équilibres contre nature se mettent en place pour le plus grand bonheur du lecteur. Mais ces phénomènes sont voués à être caduque, à des échéances plus ou moins longues.



La force du roman gothique est de faire appel au surnaturel pour résoudre les malédictions. La classification littéraire s’apparente donc ici au roman fantastique. Les cauchemars révélés en début d’histoire ne peuvent souvent que se finir en compte de fées pour les usurpés ou les maudits. Je vous conseille sur ce point le lecteur du « Château d’Otrante ». Si nous prenons l’exemple du « Moine » de Lewis, nous assistons au fil des chapitres à des drames qui laissent le premier choix aux émotions. Nous mettons de côté  le surnaturel pour plonger dans l’horreur. Comment deviner qu’Ambrosio pouvait tuer sa mère, violer et assassiner sa propre sœur.



Quand arrive la conclusion d’un roman gothique, les troubles profonds se dissipent, même si des éléments physiques ou moraux ont évolué. Dans Dracula de Bram Stoker, le vampire est mort mais Mina Harker ne pourra pas retrouver une telle passion, un tel amour. Dans « Carmilla » de Le Fanu, ce même sentiment trouble l’esprit de l’héroïne. « Le château d’Otrante » n’est-il pas fortement démoli ? La mort d’Ambrosio est sans doute l’élément qui redonne la joie de vivre à Agnès.

Un autre point lie entre eux les romans gothiques. Tout comme chez Sade, les sentiments sont exacerbés. Les passions sont sans limite, on aime jusqu’à la mort. Dracula préfère mourir pour ne pas plonger Mina, son amour, dans son éternité de ténèbres. Ambrosio dans « Le Moine », après avoir abusé des charmes de Mathilde, se transforme en monstre lubrique et dépravé. Il est animé par le besoin de transgresser. Je vous rappelle qu’il viole sa sœur dans un cimetière. Cet acte odieux culmine jusqu’au sacrilège. Même Sade n’a pas osé dans ses écrits mélanger un tel niveau de décadence physique et morale. Un lieu saint est profané dans un acte mélangeant viol et fratricide. Dans le Dracula de Stoker, c’est un monstre qui use et abuse d’un corps sans âme et sans vie apparente, un beau soir d’été. La littérature gothique et par extension la littérature vampirique sont bien les refuges des passions extrêmes et violentes.



Les persécutions sont souvent présentes et alimentent tous les excès cités précédemment. A la différence du roman fantastique, le roman gothique s’ouvre au surnaturel mais en l’assaisonnant de tous les excès dont l’homme est capable. Toutes les transgressions imaginables ont une place de choix. La maîtrise des auteurs nous transporte vers un champ d’horreur et d’abomination. Mais le lecteur averti ne se voile pas la face. Il est conscient d’avancer à pas feutrés dans un monde imaginaire qui rejette la morale et la bienséance. L’art littéraire est là pour tenter de sauver l’ordre civil et religieux.

Mais le lecteur n’est pas dupe. Nous assistons à des balais de repentir et de confession. Les crimes sont souvent commentés par le monstre fautif ou un témoin et non vécu directement. Monsieur Harker dans Dracula écrit ce qu’il subit. Sa future femme laisse dans son carnet intime ses impressions d’effroi en voyant son amie violée par un monstre. La rétrospection semble avoir été inventée pour les romans gothiques et vampiriques. Les quêtes et enquêtes sont aussi légions. Les récits rétrospectifs sont présents dans le « Moine », « les Elixirs du Diable », « le Château d’Otrante » et bien évidemment dans « Dracula ».



Le roman gothique prend vie grâce à une structure qui lui est propre et que nous retrouvons dans certains romans fantastiques. Ces ouvrages sont de parfaites bases pour les scénarios cinématographiques. Dès le muet, la littérature gothique a apporté dans les salles obscures l’émotion et l’intrigue pour tenir en haleine des spectateurs privés de la dimension sonore. 




2 commentaires:

  1. Bonjour, permettez moi cette simple remarque :
    "Dracula préfère mourir pour ne pas plonger Mina, son amour, dans son éternité de ténèbres."
    C'est effectivement le cas dans le film de Coppola.
    Coppola transforme en effet le comte en héros byronique, partagé entre nobles intentions et comportement démoniaque.
    Par contre, dans le roman, Dracula est essentiellement une force de la nature, inhumaine, maléfique et, a priori, pas amoureux de Mina.
    Bien à vous, G

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour, Je suis Patrick Méadeb, de Sonobook, éditeur de livres sonores à Bordeaux. Je me permet de vous contacter pour vous présenter notre dernière livre audio: DRACULA de Bram Stoker, texte intégral. Nous pensons que ça peut être un contenu de qualité pour un de vos articles ou pour un "article invités" dans votre blog, si possible.

    Aussi dans le prochains jours nous lancerons un jeu concours sur internet avec un quiz sur "DRACULA". Trois gagnants seront tirés au sort parmi les bonnes réponses et pourrons télécharger gratuitement le fichier audio mp3 de DRACULA sur notre site : http://www.sonobook.fr/produit/dracula-1ere-partie-livre-audio/
    Surtout n'hésitez pas à me contacter si vous désirez de plus amples
    renseignements sur le Concours et d’autres.

    Bien Cordialement
    Patrick Méadeb
    0661956425

    RépondreSupprimer